Les revendications qui ont pour finalité l’ « invisibilisation » de noms de places, rues et monuments à caractère historique controversé suscitent de vifs débats. Alors que certains acteurs expriment la volonté de rétablir une justice sociale a posteriori, d’autres questionnent de manière critique une approche jugée trop radicale.
Peut-on laisser dans l’espace public des statues de personnalités tenues pour responsables de crimes et d’injustices ou doit-on tout simplement les en retirer afin de les rendre invisibles ? Est-il possible et souhaitable de vivre aujourd’hui avec les traces mémorielles d’un passé douloureux sans les banaliser, tout en les replaçant de manière adéquate dans leur contexte socio-historique ?
C’est ce qu’interrogent, entre autres, les individus dont les actions relèvent de l’expression d’origine nord-américaine « cancel culture », littéralement « culture de l’effacement ». Elle traduit la volonté de mettre à l’écart tantôt des personnalités disparues ou encore vivantes, tantôt des objets matériels, porteurs d’une vision du monde et d’une système social perçus comme non-inclusif, injuste et inégalitaire. Cette posture génère de nombreuses tensions.
Le dépôt récent de deux pétitions à Neuchâtel est emblématique à cet égard : l’une demandait le retrait, l’autre le maintien de la statue de David De Pury, homme d’affaires très fortuné du XVIIIè siècle basé à Lisbonne et indirectement lié à la traite d’esclaves à travers ses activités commerciales. Il lègue à sa ville natale des ressources financières considérables grâce auxquelles sont effectués plusieurs travaux publics revêtant d’une grande importance aujourd’hui encore. Face à différentes représentations de l’histoire coloniale, l’action publique des autorités neuchâteloises, via un ensemble de mesures dans les domaines de la culture, de l’art et de l’urbanisme, est parvenue à instaurer un consensus entre les parties prenantes par une démarche ouverte, assumée et concertée.
Au-delà du cas neuchâtelois, cette manifestation d’une journée propose une réflexion critique utile à une meilleure compréhension de motivations et d’actions la plupart du temps conflictuelles. Elle permet également d’appréhender de manière plus sereine et informée des périodes sombres de notre héritage historique.
Le programme
Nous aurons la chance de bénéficier de la présence d’intervenants stimulants qui permettra des échanges ouverts à toutes les sensibilités, selon plusieurs perspectives et disciplines (art, politiques publiques, sciences sociales, société civile) :
–M. Thomas Facchinetti, Conseiller communal en charge du dicastère de la culture, intégration et cohésion sociale – exposé sur l’action publique des autorités et le plan d’action « Neuchâtel fait la lumière sur son passé » ;
–Prof. Biancamaria Fontana, Professeure honoraire, Faculté des sciences sociales et politiques, Université de Lausanne – présentation et échange-débat ;
Prof. Olivier Massin, Professeur ordinaire de philosophie générale, directeur de l’Institut de philosophie, Université de Neuchâtel – présentation et échange-débat ;
-M. Matthias Pfund, artiste et lauréat du concours d’idées « Regards d’artistes sur le monument De Pury » – présentation de son travail artistique et de son projet pour le monument De Pury, dans le cadre de l’appel à projets artistiques de la ville de Neuchâtel;
–M. Patrick Pabst Félix, médiateur culturel et théâtral – visite thématique guidée sur les traces du passé colonial en ville de Neuchâtel ;
-M. Faysal Mah, membre et représentant du « Collectif pour la mémoire – Neuchâtel », déposant de l’initiative pour le retrait de la statue de De Pury – présentation et échange-débat ;
–Annabelle Bourquin, journaliste de la cellule Enquête chez ArcInfo, conduite de la discussion et échange.
Langue de travail: français
Public-cible: toutes les étudiantes et tous les étudiants de la Fondation suisse d’études, communauté estudiantine de l’Université de Neuchâtel
Le nombre de participant-(e)-s : 20
Lieu : divers lieux en ville de Neuchâtel : Musée d’ethnographie, Place de Pury, autres lieux
Coordination: Stefano Aloise
Administration: Michelle Hug